« Ah bon, la Gazette c’est aussi un journal ? »
La Gazette a ouvert un café il y a 5 ans, non loin de la rédaction, près de la gare de Montpellier. S’inscrivant dans la tradition des cafés littéraires, le Gazette Café répond à trois objectifs : rencontrer les lecteurs, participer à la vie culturelle de la ville et diversifier les ressources du journal.
« Nous sommes un journal, pas un bar, pas un restaurant, pas un espace culturel » ! s’indignait en 2014 la rédaction de Libération à la Une de son journal. Les salariés s’opposaient au plan de diversification présenté par les actionnaires pour sortir le journal de la grave crise financière qu’il traversait.
Cette diversification n’a pas fait peur à La Gazette de Montpellier, bien au contraire ! Il y a cinq ans, ses fondateurs dénichent un garage désaffecté de 700 m2, y investissent 1,2 million d’euros pour aménager une cuisine, un bar, un restaurant, des salles de conférence et une scène musicale. Le lieu s’est rapidement inscrit dans la vie culturelle montpelliéraine avec 2 000 rencontres et 900 concerts organisés au Gazette Café depuis sa création.
Le barman n’est pas un journaliste
Le lieu a réussi à fidéliser une communauté intergénérationnelle et chaleureuse. Le public venu boire un verre, déjeuner, écouter un conférencier ou un concert, découvre que la Gazette est aussi un journal hebdomadaire, qui paraît le jeudi et diffuse à 17 000 exemplaires. Bien sûr,la Gazette est vendue au Gazette Café !
Derrière le bar, pas de journaliste, mais plusieurs d’entre eux le fréquentent régulièrement. Et beaucoup le savent à Montpellier : désormais pour donner une info, un communiqué ou rencontrer un journaliste, il suffit de se rendre au Gazette Café.
Ses créateurs ont aussi réussi à imposer le lieu comme passage obligé des conférences de presse culturelles données par la ville. Ils ont créé un festival de piano et donnent un coup de pouce musical aux jeunes talents régionaux.
« C’est sympa mais on bouffe mal »
La première année n’a pas été un succès, reconnaît Pierre Serre, directeur du journal et l’un des fondateurs du café, parce que « on s’est rendu compte qu’il fallait faire de la vraie cuisine, pas que des omelettes » ! Les gens appréciaient le lieu, les cafés littéraires, les cafés philos, mais avaient ce commentaire unanime : « c’est sympa mais qu’est-ce qu’on bouffe mal ! ». Très vite le Gazette Café embauche des professionnels en cuisine et améliore l’insonorisation des lieux pour préserver de bonnes relations de voisinage.
Aujourd’hui le chiffre d’affaires du Gazette Café c’est 1,3 million d’euros par an et celui du journal 5 millions d’euros, dont 75% proviennent de la publicité locale. Le Gazette Café dégage entre 200 000 et 250 000 euros de bénéfices. Les deux entités sont clientes l’une de l’autre. Les journalistes de la rédaction peuvent manger au Gazette Café à un tarif préférentiel et le café, qui paie notamment la parution de ses agendas dans l’hebdo, est devenu l’un des meilleurs clients publicitaires du journal.
Pause Covid
« Gazette Café fait briller la marque la Gazette, et nous souhaitons créer un nouveau café à Nîmes, où La Gazette existe aussi, explique Pierre Serre, mais dans l’immédiat la priorité est de surmonter les conséquences de la crise sanitaire. Dès la semaine prochaine le Gazette Café devra fermer à 22h… »
Cécile Dauguet