La stratégie de régionalisation de France 3
Laurence Mayerfeld, directrice du réseau régional de France 3, revient sur la naissance de NoA et détaille les priorités des chaînes publiques en matière d’info de proximité.
La régionalisation est au cœur de la stratégie de France 3, qui ambitionne,
à terme, de se diviser en 13 chaines régionales. Cela a commencé en Corse, puis s’est poursuivi, il y a environs trois ans, lorsque Laurence Mayerfeld, alors directrice régionale de France 3 Aquitaine, lance l’idée de faire de l’info locale 24h/24. Ainsi nait NoA (pour Nouvelle-Aquitaine).
France 3 en confiance sur l’info de proximité
Pour diffuser de la matière de proximité en continu, la chaine choisit de présenter tous les journaux d’information du territoire, soit 6 journaux et les 5 éditions d’info locales. Elle y ajoute une création, « le 21h », le journal de la grande région. Il est réalisé au quotidien et en rotation par les équipes de Limoges, Bordeaux et Poitiers.
Parallèlement, les plateformes grandissent. Et « la soif d’aller chercher des fictions et des documentaires sur les plateformes n’est pas antinomique avec l’appétit que les Français ont pour leur territoire ». Dernièrement, l’actualité des Gilets jaunes met en avant une revendication : celle d’avoir la parole chez soi. Ensuite, ce fut le confinement, période durant laquelle les gens étaient d’autant plus intéressés d’avoir des infos sur leur territoire qu’ils ne pouvaient sortir de chez eux. Cela s’est ressenti sur les audiences. Cet intérêt pour le local n’a pas chuté au déconfinement.
» ça a du sens de donner la parole aux citoyens des territoires,
ça a du sens de ne pas voir l’information qu’à travers un prisme centralisateur et donc pas uniquement du point de vue de la capitale »
Laurence Mayerfeld
France 3 évolue donc en confiance sur la question de l’information de proximité. La régionalisation est l’axe majeur de sa stratégie. Dans le futur, sur les 13 chaînes, sera gardée la structure établie avec de l’information locale et de l’information régionale. Aujourd’hui, la réflexion porte sur l’intérêt d’une information « grande région » : cette division territoriale est devenue tellement grande qu’elle regroupe des citoyens de localités très éloignées. Par ailleurs, comme le reconnaît Laurence Mayerfeld, les Français circulent. Un Poitevin peut donc développer un intérêt pour ce qui se passe à Toulouse.
L’immédiateté du numérique marié à l’info TV « labellisée »
France 3 a intégré des fils numériques qui permettent d’informer en temps réel l’internaute, voire le public. Cela a changé leur pratique journalistique :
- les rendez-vous : l’info n’est plus un rendez-vous ponctuel en soirée, c’est tout le temps, en continu ;
- les écritures journalistiques télévisées : l’info présentée au JT a déjà été donnée sur le support numérique. Au cours de la journée, elle a été commentée et enrichie.
Les rendez-vous d’information télévisés doivent ajouter une plus-value par rapport à la délivrance numérique, sans non plus oublier que, pour des générations moins connectées, ils sont néanmoins un lieu de première délivrance. L’écriture journalistique a donc évolué vers davantage de contextualisation, de décryptage, de narration de cette information. Aujourd’hui, Laurence Mayerfeld se satisfait de la complémentarité de l’immédiateté des canaux numériques et des moments « un peu posés » de la télévision.
« L’info locale, c’est faire émerger des informations de l’intégralité du territoire et pas uniquement des grandes métropoles, et accorder la parole à des gens qui ne l’ont jamais, ou ne peuvent pas l’avoir. »
Laurence Mayerfeld
Ainsi, en réponse à une question posée par un festivalier, qui questionne la concurrence avec BFM, Laurence Mayerfeld explique qu’ils ne font pas le même travail. « France 3 n’a pas de plateau en continu avec des invités et des infos en fond d’écran. Elle est plutôt dans le témoignage. »
Leur stratégie sera de faire attention aux modes de consommation du numérique en terme d’information, et de s’y adapter. « Dans une première période, les gens voulaient des vidéos. Cela est en train de passer. L’appétence se déplace vers des papiers enrichis. »
Des projets de partenariats ?
Laurence Mayerfeld considère qu’il est logique que des opérateurs traditionnels des territoires, d’importance historique, se posent la question de fusion. Avec France Bleu, des partenariats sont déjà réalisés via des matinales. Quant à la PQR, la réflexion est menée sur leurs offres respectives et le développement d’une complémentarité. De manière générale, conclut Laurence Mayerfeld, les partenariats sont envisageables dès lors qu’ils apportent une plus-value, une complémentarité. Et ils peuvent alors se faire avec des opérateurs historiques comme des éditeurs privés d’information locale.
Gaëtane Bouvy